Sur les restrictions imposées pour la venue de l'OTAN à Strasbourg<br><div class="gmail_quote">
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Atteintes aux libertés ?<br>
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Patrick Wachsmann, professeur de droit public à l'Université de<br>
Strasbourg, auteur chez Dalloz d'un manuel sur les libertés publiques,<br>
livre son point de vue sur la légalité des restrictions imposées aux<br>
Strasbourgeois et aux manifestants à l'occasion du sommet des 3 et 4 avril.<br>
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Sur les restrictions imposées pour la venue de l'OTAN à Strasbourg<br>
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Les mesures imposées aux Strasbourgeois résidant ou travaillant dans les<br>
zones rouges ne vont-elles pas un peu trop loin en terme de respect des<br>
libertés individuelles ?<br>
- Leur légalité ne me semble pas évidente au regard des textes qui<br>
garantissent les libertés individuelles, soit la Convention européenne<br>
des droits de l'homme, la Constitution française et la loi. La liberté<br>
d'aller et venir est notamment garantie par une règle de valeur<br>
constitutionnelle, posée par une jurisprudence de 1980. Si on ajoute le<br>
fait qu'apparemment, les personnes sans badge ne seraient pas admises à<br>
rentrer chez elles, c'est clairement illégal. La liberté de domicile<br>
s'impose à l'autorité administrative sous une seule réserve qui tient<br>
aux nécessités du maintien de l'ordre public. On peut concevoir qu'à<br>
proximité d'une zone où règne un danger pour le public, on se fasse<br>
contrôler, mais de là à y restreindre l'accès et imposer qui peut y<br>
entrer ou non, c'est abusif. D'autant plus que la situation est créée<br>
par l'autorité puisque c'est elle-même qui a décidé de tenir le sommet à<br>
Strasbourg.<br>
Un recours en justice peut-il être envisagé ?<br>
- N'importe quel Strasbourgeois intéressé, c'est-à-dire touché par les<br>
mesures, est fondé à attaquer la décision devant le juge administratif.<br>
Mais la solution pour le juge n'a rien d'évident. De même, les mesures<br>
préventives comme par exemple l'obligation du badge, qui, j'imagine, ont<br>
été prises par le préfet ainsi que les mesures individuelles<br>
d'application qui seront prises lors du sommet, par exemple l'accès<br>
restreint aux commerces et aux entreprises, sont susceptibles d'être<br>
attaquées. Mais je doute que quelqu'un aille jusque-là. On vit du reste<br>
déjà en France avec pas mal de mesures restrictives des libertés, telles<br>
les différents fichiers, la vidéosurveillance, etc.<br>
Y a-t-il des précédents en la matière ?<br>
- Il faut remonter à l'arrêt « Dames Doll et Laurent ». C'est un grand<br>
arrêt de la jurisprudence administrative pris par le Conseil d'Etat en<br>
1919. Il a fixé des limites à l'action des pouvoirs publics en matière<br>
de restriction des libertés en définissant ce qu'on appelle depuis la «<br>
théorie des circonstances exceptionnelles ». Dans le cas du sommet de<br>
l'OTAN à Strasbourg, on peut se demander si elle s'applique, sachant que<br>
la situation est créée par l'autorité administrative. Tout se passe ici<br>
comme si un monarque, n'écoutant que son bon vouloir, avait décidé<br>
d'imposer un régime d'exception temporaire à Strasbourg.<br>
Le préfet est-il en droit de refuser aux organisateurs du contre-sommet<br>
de manifester au centre-ville ?<br>
- La Constitution et l'article 11 de la Convention européenne des droits<br>
de l'homme garantissent la liberté de manifester pacifiquement. Ce qui<br>
est le cas puisque le préfet n'a pas interdit la manifestation.<br>
Toutefois, si on craint des débordements, on peut encadrer cette liberté<br>
en vertu d'un décret-loi de 1935. Or l'expérience montre qu'à l'occasion<br>
de ce genre de sommet, des risques réels existent. Le préfet est donc<br>
fondé à interdire le centre-ville et à demander aux organisateurs que la<br>
manifestation passe là où elle présente le moins de risques de troubler<br>
l'ordre public.<br>
Comme Strasbourgeois, que vous inspire ce déploiement de contraintes ?<br>
- Il apparaît disproportionné par rapport à un profit touristique qui<br>
reste, selon moi, imaginaire. La liberté des gens semble être le cadet<br>
des soucis des autorités. On assiste à une sorte d'exacerbation du<br>
tout-sécuritaire qui me semble dangereuse pour la démocratie. Je suis<br>
choqué que l'on ait décidé d'organiser ce sommet à Strasbourg et qu'on<br>
découvre après coup les problèmes que cela soulève. Car la ville n'est<br>
pas équipée pour assurer la sécurité de ce genre de rencontre. Le camp<br>
militaire de Mutzig aurait été plus indiqué. On fait souvent le<br>
parallèle avec la visite du pape en 1988. Bien que sa vie fût alors<br>
menacée, je n'ai pas souvenir qu'il y ait eu des mesures pareilles<br>
imposées aux Strasbourgeois.<br>
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Xavier Thiery</div><br>