[Dissent-fr-info] Agitateurs de tous les pays, méfiez-vous !

Dissent! France Info Newsletter dissent-fr-info at lists.aktivix.org
Tue Feb 1 03:54:36 UTC 2011


Europol, l’office européen de police, permet le fichage de toutes les
personnes condamnées dans l’UE, mais aussi des simples suspects. Un
mécanisme aisément détourné contre de nombreux mouvements contestataires.
Viktor Funk

Le 4 octobre 2010, un drone de l’armée américaine lance un missile à la
frontière pakistano-afghane. Au moins trois personnes, de jeunes hommes,
sont tuées au cours de cette attaque. Cela n’a rien d’inhabituel dans la
région. Parmi les victimes figure toutefois un Allemand. Voilà qui n’est pas
habituel.

Bünyamin E., 20 ans, était soupçonné de suivre un entraînement dans un camp
terroriste. Le parquet de Düsseldorf enquêta sur lui. Après sa mort
toutefois, personne n’enquêta sur ceux qui l’avaient tué, ni sur les soldats
américains qui commandaient le drone à distance, ni sur leurs supérieurs.

L'armée américaine a exécuté un Allemand sans procès

Les autorités allemandes ont du mal à engager des poursuites lorsque des
alliés dans la guerre contre le terrorisme exécutent des citoyens allemands
ou les enlèvent, comme dans le cas de l’islamiste de Hambourg, Mohammed
Zammer, à l’automne 2001. En revanche, elles n’hésitent pas à communiquer
des données personnelles aux organes de sécurité d’autres pays, même si les
suspects n’ont aucun casier judiciaire.

Le cas de Bünyamin E. montre ce qui peut se passer dans les cas extrêmes
lorsque des services étrangers exploitent les informations concernant des
terroristes présumés : l’armée américaine a jugé que Bünyamin était un
terroriste et l’a exécuté sans autre forme de procès.

A l’avenir, les services de sécurité étrangers pourraient s’en prendre
encore plus souvent à des ressortissants d’autres Etats sans passer par la
voie des tribunaux. Le Conseil de l’UE plaide en effet pour la mise en place
d’un programme d’échange de données bien plus vaste que l’actuel système de
coopération entre pays membres.

La création de l’agence de police communautaire (Europol), le 1er janvier
2010, a donné lieu à l’ouverture d’un grand centre d’analyse à La Haye.
C’est là que sont exploitées les données personnelles de citoyens de l’UE et
de là qu’elles sont ensuite transmises à des pays membres d’Europol et de
pays tiers.

Il est explicitement prévu qu’Europol ne reçoive pas seulement des
informations concernant des personnes condamnées mais également les données
de toute personne jugée suspecte par n’importe quel service de sécurité.

A l’heure où le crime s’organise à l’échelle mondiale, on pourrait se dire
que ce n’est pas une mauvaise idée. Mais il se trouve que depuis quelques
années les agences de sécurité nationale s’échangent essentiellement des
informations sur les agitateurs politiques. Les dernières révélations
concernant l’histoire de taupes infiltrées dans les milieux protestataires
britanniques et allemands ne sont qu’un aperçu du système d’échange
d’information entre pays européens.
Tous les agitateurs fichés

En Europe, tous ceux qui prônent la désobéissance civile peuvent
manifestement se dire qu’ils sont surveillés par des services de police
étrangers, surtout s’ils se déplacent pour participer à des manifestations
dans d’autres pays. Ceux qui bloquent les voies ferrées pour manifester
contre le nucléaire, s’en prennent aux fermes pratiquant l’élevage en
batterie ou bloquent les autoroutes pour protester contre les frais
d’inscription à l’université, tous ceux-là pourraient se retrouver dans la
base de données Igast de la police criminelle allemande.

L’Igast (International agierende gewaltbereite Störer) rassemble toutes les
données possibles sur les "agitateurs potentiellement violents et actifs au
plan international". Leurs moyens de communication et leur appartenance à
différents groupes présentent donc un intérêt particulier. C’est ce que
souligne le Conseil de l’UE dans un mémo.

Le vieux débat au sein du gouvernement de coalition allemand à propos de la
conservation des données se comprend mieux à la lumière de la stratégie
d’Europol. A l’avenir, il serait par exemple possible, et nettement moins
coûteux, de "protéger" une grande réunion de l’Otan contre toute
perturbation. Rien qu’en utilisant les moyens de communication
électroniques, il est possible de savoir comment les manifestants
arriveront, qui seront les meneurs et avec qui ils sont en contact.
"Celui qui n’a rien à se reprocher n’a rien à craindre."

La police judiciaire de Wiesbaden a déjà plusieurs fois transmis à d’autres
pays des informations concernant des manifestants allemands. De même la
police allemande a-t-elle certainement donné des informations aux services
américains à propos de Bünyamin E. Dans le premier cas, les manifestants
allemands ont probablement été refoulés à la frontière mais, dans le second,
un homme est mort.

Le mantra des autorités policières est toujours le même : "Celui qui n’a
rien à se reprocher n’a rien à craindre." Dans ce contexte, cela semble
absurde. Le principe fondamental de la présomption d’innocence est balayé
lorsque l’on établit à titre préventif le profil et les réseaux de chaque
individu et que la police juge ces informations suffisantes pour appliquer
une sanction.

S’il y a un sens à la collaboration des services de police des différents
Etats entre eux, ils ne doivent pas criminaliser les actions politiques et
sanctionner leurs auteurs sans le jugement d’un tribunal indépendant.

source:
http://www.presseurop.eu/fr/content/article/476641-agitateurs-de-tous-les-pays-mefiez-vous
-------------- next part --------------
An HTML attachment was scrubbed...
URL: <https://lists.aktivix.org/pipermail/dissent-fr-info/attachments/20110201/f01bab28/attachment.htm>


More information about the Dissent-fr-info mailing list